Souvent tout ce qui était tué était partagé au reste du groupe et aussi on s’entraidait comme lorsque quelqu’un était malade. Les Innus partaient plustôt à l’intérieur des terres quand ils n’avaient plus rien à manger sur la Côte. Quand quelqu’un tuait quelque chose, il en avait suffisamment pour tout le groupe. On partageait tout.
Avant de monter dans le territoire, les Innus s’attendent les uns les autres. Ils tirent des coups de fusil pour indiquer leur présence ou leur arrivée.
C’est lorsque nous étions à l’intérieur des terres que nous avions de l’enseignement sur les méthodes de chasse, des chasseurs et bien sûr mon grand-père Mishtikushish, c’est là où nous imitions ce qui se faisait. Il y avait beaucoup de travail à faire avant de monter dans le bois, il fallait fabriquer plusieurs choses : raquettes, tabagane, pelle... Une fois, après son mariage il s’est blessé en chassant, il a failli s’empaler avec un morceau de bois en voulant éviter un caribou en rut. Il avait 14 ans ou 15 ans lorsqu’il a tué son premier caribou.
Il parle des animaux et de leur nombre autrefois, des animaux qui étaient proches de la mer et à l’intérieur des terres : ours, caribous et orignaux. Il y avait des caribous avant et maintenant il n’y en a plus, les caribous des bois, ils étaient bons à manger et ils étaient gras. Il parle du comportement des caribous et des orignaux lorsqu’ils sont dans la période du rut. Ils ont une forte odeur. Ce n’est pas compliqué de le chasser, on peut l’appeler en imitant son cri, on l’entend s’approcher de plus en plus et il vient vers nous. Il dit aussi que le caribou n’est pas peureux quand il est en compagnie des femelles, c’est la même chose pour l’orignal. Finalement, Il raconte aussi des histoires de chasse à l’orignal et au caribou.
Quand les Innus montent en groupe dans le territoire, ils choisissent un des leurs pour les mener, ce sera leur capitaine. C’est lui qui dira ce qu’ils vont faire. Ce sont les Innus qui le choisissent car ils ont confiance en lui et tous vont suivre ses instructions.
Je connais plus la région de la rivière Romaine, dit-il : les portages, les rivières et les lacs. Il nous donne les noms des endroits où il est allé. Il y a plusieurs noms. Là où il y a actuellement la construction des barrages, il y avait une sépulture, c’était une vielle femme dit-on. Elle avait demandé à son décès d’être enterré là, pour que tous ceux qui vont vers l’intérieur des terres puissent prier pour elle. Maintenant, ils construisent des barrages. Nous sommes allés voir ces barrages avec « celui qui fait l’électricité ». Je lui ai alors dit : « La vielle dame qui est enterrée à cet endroit n’a pas demandé à être ennoyée ». Les ossements seront ramenés vers la mer m’a-t-il dit, je lui ai fait savoir ce que je pensais de lui. Et là-bas, là où sera fait le dernier barrage dit-il, je n’aurais jamais pensé qu’il y aurait un barrage à cet endroit, nous nous promenions là, dit-il.
Autrefois, l'Innu était favorisé par la chasse, il pouvait utiliser n'importe quel arme, il rapportait toujours une prise. Dans ce temps-là, les Innus ne chassaient que ce dont ils avaient besoin. Quand ils tuaient un ou deux caribous, ils étaient contents car ils avaient assez de viande pour nourrir leur famille. De nos jours, les Innus ont tendance à tuer beaucoup plus de caribous que nécessaire. On ne vit plus comme autrefois.
Paul-Arthur montre l'instrument que l'Innu utilisait pour voir au loin. Une simple tige en bois qui n'est même pas trouée au centre. Avec cet instrument, l'Innu pouvait repérer les animaux au loin. Aujourd'hui, les Innus ne s'en servent plus, ils achètent des longue-vues qui coûtent très cher.
Les jeunes sont très contents d’apprendre la culture. Ils sont à l’écoute quand on leur explique comment nettoyer le gibier. On leur enseigne comment ils vont chasser, il faut faire attention à la façon de faire les choses. Il faut très attention au chasseur, à comment seront ses habits de chasse. C’est tellement différent de nos jours.
Marie Mckenzie raconte que, quand son frère tuait un animal, il le dépeçait, le préparait et cuisait une partie de la viande sur place et ramenait la viande au campement par la suite.
Elle raconte qu’après leur mariage, elle et son mari sont montés dans le bois. Ils sont retournés à Schefferville après que son mari ait tué un caribou. Ils sont retournés en forêt l’automne suivant.
C’est quand on partait de Ekuanitshit autrefois quand on allait à l’intérieur des terres, nous remontions la rivière Saint-Jean. Là où il y a le pont. Qui aurait un jour pensé qu’il y aurait un chemin à cet endroit, qu’il puisse y avoir des voitures qui passent par là. Il y avait beaucoup de portage, des portages très long à parcourir et certain qui sont plus courts. On transportait les choses en plusieurs voyages, on les transportait sur le dos avant d’arriver à destination, en sortant du bois en partageant le canot. Et toute la fatigue ressentie, même si la personne était malade il fallait quand même voyager. Et aujourd’hui personne ne bouge quand il a quelque chose, quand il est malade, alors qu’autrefois c’était différent.
Elle raconte une autre histoire où on montait à l’intérieur des terres avec son mari et d’autres Innus. Ils allaient passer l’hiver à Nashkuaikan. Durant le voyage pour aller au campement d’automne, ils pêchaient le saumon, tuaient un ours, des caribous, des porc épics et des perdrix blanches pour se nourrir. C’est vrai qu’il y a plusieurs activités à faire quand on est à l’intérieur des terres : on chasse, on fait la pêche au harpon. Pendant leur séjour d’automne, ils faisaient aussi de la chasse.
Quand les Innus tuaient un ours, ils étaient contents car l’ours peut servir à différents usages; toutes les parties sont utilisables. Quand ils tuaient un ours, les Innus avaient du gras pour une année. Sa viande est bonne et la peau est aussi très chaude. L’ours est très intelligent, il comprend quand on lui parle mais il y a une façon spéciale de s’adresser à lui.
On devait travailler très fort tout le temps, tout le monde travaillait fort. Et moi, maintenant cela fait presque sept ans que je ne peux plus rien faire, rester assis, manger, seulement cela. Avant quand j’étais à l’intérieur des terres, ce n’était pas ainsi, je me promenais beaucoup dans le territoire, j’allais très loin. Il faisait nuit noire quand je rentrais parfois. Et je n’ai jamais senti la présence de quelqu’un. Une fois, je suis tombé en bas d’une falaise parce qu’il faisait très noir, j’étais avec mon frère aîné Michel, on rentrait chacun à son campement. On ne voyait rien tellement, il fait noir.
Le frère de Marie Mckenzie, Napessish, était un très bon chasseur. Il tuait beaucoup de gibier de toute sorte et beaucoup de poissons. Pour le reste de la nourriture comme la farine, son père et ses frères devaient partir en chercher quand ils en manquaient.
Nous allions souvent à l’intérieur des terres, c’est seulement après mon mariage que je suis resté proche de Mingan. J’allais à l’intérieur des terres avec mon père, mon grand-père Mishtikushish et mon grand-père Tamienish. Nous chassions le castor et le caribou. Lorsque les lacs et rivières commençaient à dégeler, nous retournions vers la côte. Une fois, au retour, nous avons ainsi croisé notre grand-père Nolin et Joseph, nous avons mangé avec eux : de la viande de caribou, de la viande séchée et de la graisse de caribou. Nous avons par la suite repris le chemin du retour.
Au moment de revenir des territoires, plusieurs enfants sont nés. Autrefois, on racontait aux enfants que les bébés étaient retrouvés à l’intérieur d’une souche de bois. À la naissance, les enfants sont bénis par les sages-femmes avant qu’ils ne soient baptisés. Et puis c’était déjà le retour vers la côte.
Ben Mckenzie énumère les noms des différents portages et indique l’emplacement des territoires des familles innues allant du portage du lac Ashuanipi jusqu’au territoire actuel de Kauauatshikamat près de Schefferville. Le territoire de chasse de sa famille s’étendait du lac Mehinek jusqu’au portage du lac Wakuach.
Nous étions partis dans le bois avec ma grand-mère Nenikutesh. Nous n’avions rien à manger, nous souffrions de la faim. Les enfants qui étaient là dans ce temps-là sont presque tous décédés maintenant. Puis, plusieurs caribous sont tués, une centaine. Nous avons beaucoup de nourriture, car nous étions sept tentes. Nous retournions tranquillement vers la mer. J’aimais beaucoup ma vie dans le bois, tout ce que nous faisions dans le temps.
Un hiver, nous partions vers la côte en tirant nos toboggans, ma sœur Philomène était encore un bébé. Mon frère Napessish pêchait chaque soir pour nourrir sa petite sœur. On recueille le gras du poisson pour le donner à ma petite sœur Philomène. Mon frère a pêché jusqu’à notre arrivée sur la côte.