Il y a très longtemps, l’été n’existait pas. Il n’y avait que l’hiver. Un petit garçon se fait abandonné sur un vieux campement par ses parents, car il a des poux. Ses parents partis, il pleure sans arrêt. Il voit venir à lui un géant, il a peur. Mais celui-ci l’aide, l’épouille et l’amène avec lui à la recherche de ses parents. Un jour le grand-père part, la mère ne l’aime pas. Avant de partir, il met en garde la mère que l’enfant va pleurer lorsqu’il constatera son départ. La seule chose qui le consolerait, c’est de tirer sur les oiseaux d’été. Tout le monde part donc à la recherche des oiseaux d’été qui divertiront l’enfant. Plusieurs aventures arrivent aux chercheurs d’été. Lorsqu’enfin on retrouve les oiseaux d’été, les saisons vont changer; il y aura l’été et il y aura l’hiver. L’enfant va pouvoir lancer des flèches sur les oiseaux. Un jour on ne vit plus l’enfant, on retrouva ses vêtements et on vit un oiseau grimpé sur une branche, il était jaune et comme s’il portait un chapeau.
Hélène Nolin est née à l’intérieur des terres, au nord de Nutashkuan, le 5 octobre 1931. En 1948, elle a épousé Jérôme Mollen et ils ont eu 16 enfants, 10 garçons et 6 filles. Ils furent mariés plus de 62 ans. Elle a 41 petits-enfants et 80 arrière-petits-enfants. Aujourd’hui, elle est la doyenne de Ekuanitshit. Elle est en très bonne santé et est encore très active dans la communauté. Elle fait de l’artisanat, des mocassins et raconte des légendes.
Comme c’est une habitude chez les Innus avant de commencer un travail, Hélène fait une prière. Elle souhaite que le travail qui sera fait aujourd’hui se déroule bien.
C’est à cet endroit que se réunissaient les Innus pour des célébrations religieuses annuellement, des mariages et pour recevoir des sacrements religieux. C’est à cet endroit qu’est décédé le grand-père du mari de madame Mollen. Cet homme qui avait aidé à construire l’église, une semblable à celle actuellement à Ekuanitshit. Après la période estivale terminée, les Innus se préparaient à repartir vers l’intérieur des terres. À l’approche de l’automne, tous étaient partis vers les territoires.
À la fin de l’été, après les mariages et les cérémonies, on retournait à l’intérieur des terres. C’est à ce moment-là que la maladie frappe et qu’un décès survient. Pendant la veillée funèbre, un caribou est tué, on s’occupe de nettoyer, le découper et de le faire cuire. Tout le monde mange à sa faim, même les enfants. Tout était mangé. Après la cérémonie, on retourne chercher ce que nous avions laissé dans un autre lieu. C’est ainsi que vivaient les Innus.
Au moment de revenir des territoires, plusieurs enfants sont nés. Autrefois, on racontait aux enfants que les bébés étaient retrouvés à l’intérieur d’une souche de bois. À la naissance, les enfants sont bénis par les sages-femmes avant qu’ils ne soient baptisés. Et puis c’était déjà le retour vers la côte.
Les enfants savaient faire beaucoup de choses. On leur enseignait et ensuite ils exécutaient plusieurs tâches ménagères. Ils aidaient les aînés, ramassaient le sapinage. Ils faisaient le lavage, tricotaient et fabriquaient des mocassins. C’était de bons apprenants. Ils recevaient une bonne éducation.
Autrefois les Innus avaient probablement leur religion. Ils n’étaient pas baptisés comme maintenant. Quant à la tente tremblante, elle était très puissante. C’était utilisé par les aînés seulement pour avoir des informations.
Il y avait des personnages qui habitaient l’intérieur des terres. Les Innus sentaient parfois leur présence, sans les voir. Ces personnages voulaient faire peur aux Innus. Les aînés disaient que c’était des déserteurs qui fuyaient la guerre. C’est comme deux jeunes de Longue-Pointe qui se sont enfuis à l’intérieur des terres. Ils avaient été retrouvés morts. Ils avaient écrit un journal de leur séjour. L’un d’eux s’était blessé aux pieds et l’autre était malade.
Moi je ne parle qu’innu, je demande à mes petits-enfants de me parler innu. Il ne faut pas que cela se perde. Mon père parlait les trois langues. Ma grand-mère était une blanche et parlait la langue innue couramment et parlait français qu’aux blancs. Les enfants comprendraient bien si on ne leur parlait qu’innu, cela aiderait à la survie de la langue innue.
On pourrait apprendre aux enfants la langue innue et la culture, surtout à la pratiquer, comme fait un jeune qui travaille avec un aîné. On pourrait leur apprendre à nettoyer la peau de caribou. Ils pourraient ainsi faire des mocassins. On en faisait en caribou et en loup-marin.
Il y a plusieurs portages à l’intérieur des terres. Quand on faisait des voyages vers Nashkuaikan sur la rivière Romaine. Tous les portages ont des noms liés à la géographie. Actuellement, ce n’est plus pareil comme c’était autrefois à cause des travaux de barrages qui sont en construction.
Plusieurs plantes peuvent aider à soigner plusieurs maladies. On fait des tisanes ou des cataplasmes. Mes connaissances des plantes médicinales me viennent des aînées que j’accompagnais lorsqu’elles faisaient les cueillettes. C’est elles qui m’ont initié pour préparer et faire les médicaments.
Après leur mariage, ils sont partis à l’intérieur des terres. C’est là que son beau-père, Sylvestre Mollen, se blesse ; il se casse la jambe. C’est son mari et sa belle-mère qui le soignent, qui s’occupent de sa blessure. Il faut aussi le ramener à la côte. Lorsqu’il voit le médecin, celui constate très impressionné, que la façon que cela a été traité a aidé à la guérison. Les os se sont soudés ensembles avec les attelles en bois. On voit le savoir des anciens et leurs compétences.
Elle raconte une autre histoire où on montait à l’intérieur des terres avec son mari et d’autres Innus. Ils allaient passer l’hiver à Nashkuaikan. Durant le voyage pour aller au campement d’automne, ils pêchaient le saumon, tuaient un ours, des caribous, des porc épics et des perdrix blanches pour se nourrir. C’est vrai qu’il y a plusieurs activités à faire quand on est à l’intérieur des terres : on chasse, on fait la pêche au harpon. Pendant leur séjour d’automne, ils faisaient aussi de la chasse.
Alors que c’est la chasse d’automne, un ours est tué et on fait de la graisse d’ours. On tue aussi un porc épic et il y aura de quoi manger. Noël approche. La nuit, il y a des prières et des chants. On a pisté plusieurs caribous, il semble en avoir plusieurs. Mais ce n’était que deux caribous qui étaient pris ensemble par les cornes. C’était le bon temps, être dans le territoire. Au printemps, c’est le retour vers la communauté.
C’est arrivé lors du retour vers la communauté, c’est à ce moment-là qu’est né Simon. C’est Madame Philomène Bernard qui l’a accouché et c’est elle qui lui a donné son prénom. Avant, lorsqu’une femme attendait un bébé, elle marchait jusqu’à son accouchement.
On faisait la chasse du printemps avant. On allait aux castors. C’était au mois d’avril qu’on revenait vers la communauté. Une fois, raconte Hélène, on dormait à la belle étoile, proche de Nashkuaikan. Les enfants aimeraient aussi faire la chasse au printemps.
Je m’appelle Raphaël Mollen, j’ai 80 ans. J’ai été marié et j’ai eu 5 enfants et j’ai des petits-enfants. Je ne sais pas quelles sont mes origines, les Mollen. Je sais que mon père et mon oncle Antoine arrivaient de Pakut-shipu et de Unaman-shipu. Je ne sais pas d’où venait mon grand-père Jos Mullen, un Anglais, peut-être de Tshishe-shatshit ou de Terre-Neuve. Mon père se nommait Sylvestre, quant à ma mère Marguerite, elle venait de Mingan. Je suis né au Lac Manitou proche de Mingan. J’avais 12 frères et sœurs.
Nous allions souvent à l’intérieur des terres, c’est seulement après mon mariage que je suis resté proche de Mingan. J’allais à l’intérieur des terres avec mon père, mon grand-père Mishtikushish et mon grand-père Tamienish. Nous chassions le castor et le caribou. Lorsque les lacs et rivières commençaient à dégeler, nous retournions vers la côte. Une fois, au retour, nous avons ainsi croisé notre grand-père Nolin et Joseph, nous avons mangé avec eux : de la viande de caribou, de la viande séchée et de la graisse de caribou. Nous avons par la suite repris le chemin du retour.
On devait travailler très fort tout le temps, tout le monde travaillait fort. Et moi, maintenant cela fait presque sept ans que je ne peux plus rien faire, rester assis, manger, seulement cela. Avant quand j’étais à l’intérieur des terres, ce n’était pas ainsi, je me promenais beaucoup dans le territoire, j’allais très loin. Il faisait nuit noire quand je rentrais parfois. Et je n’ai jamais senti la présence de quelqu’un. Une fois, je suis tombé en bas d’une falaise parce qu’il faisait très noir, j’étais avec mon frère aîné Michel, on rentrait chacun à son campement. On ne voyait rien tellement, il fait noir.
Je ne me suis pas rendu jusqu’à Tshishe-shatshit mais je n’étais pas loin de là. Il y avait un magasin de Mishta-Napeu proche de là, on allait y chercher de la nourriture, c’est de là que nous avons rebroussé chemin. Tous les portages qu’il y a proche de Mingan, je les ai tous fait à pied.
C’est lorsque nous étions à l’intérieur des terres que nous avions de l’enseignement sur les méthodes de chasse, des chasseurs et bien sûr mon grand-père Mishtikushish, c’est là où nous imitions ce qui se faisait. Il y avait beaucoup de travail à faire avant de monter dans le bois, il fallait fabriquer plusieurs choses : raquettes, tabagane, pelle... Une fois, après son mariage il s’est blessé en chassant, il a failli s’empaler avec un morceau de bois en voulant éviter un caribou en rut. Il avait 14 ans ou 15 ans lorsqu’il a tué son premier caribou.